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Huismes et son histoire : une gare inaccessible pendant 13 ans

Gare huismesJusqu’en 1850, les transports des marchandises se faisaient surtout par la navigation fluviale et le transport des voyageurs par des diligences sur des routes souvent peu sûres et en mauvais état. Aussi fut-il soumis aux différentes municipalités concernées, un projet de ligne de chemin de fer des Sables d’Olonne à Tours, passant par la Roche sur Yon, Bressuire, Loudun et Chinon.

Le 14 Mai 1872, le Maire de Huismes, M. Louis Boucher, soumettait au Conseil le tracé de la future ligne de chemin de fer de la Vendée à Tours. Le plan présenté indiquait le passage de cette ligne à l’extrémité Est de la Commune avec un emplacement de station bien mal choisi puisqu’il se trouvait à la lisière de la forêt, à 4 Km du bourg et dans un lieu très peu habité. Il s’agissait du point le plus éloigné du bourg et surtout d’un accès impraticable obligeant les habitants à se rendre à la gare à travers champs ou, par des chemins détournés. Le Conseil Municipal demandait donc au Président de la Compagnie de Vendée de modifier le tracé de la ligne pour que la gare soit le plus possible rapprochée du bourg.

En 1874, alors que la gare de Chinon venait d’être inaugurée, le Conseil Municipal réitérait son désaccord avec la Compagnie de Vendée, regrettant que la gare soit aussi excentrée et sans aucune voie de communication. Il se plaignait aussi de ne pas avoir été consulté en temps utile, la Compagnie ayant exécuté une grande partie des travaux de la ligne sans attendre le résultat des enquêtes. Il proposait alors que cette station soit placée dans la pièce des Garantes, entre le château d’Usage et celui de la Villaumaire, à proximité de la route départementale n° 16 et du chemin vicinal n° 15 qui y aboutit.

Une proposition logique et raisonnable, repoussée par la Compagnie de Vendée qui informait le Maire de Huismes qu’il était impossible de modifier le tracé de la ligne. Le Maire, face à une situation bien délicate, demandait alors au Préfet d’intervenir pour que la Compagnie établisse une communication directe entre la gare et le chemin vicinal n° 15 reliant Usage  à St Benoît. Confronté aux tergiversations et aux  reculades de l’Administration et de particuliers, le Conseil Municipal n’était pas au bout de ses peines, accumulant des courriers avec la Compagnie peu coopérative. En 1878, les travaux du chemin d’accès à la gare n’étaient toujours pas réalisés. Le Ministère des Travaux Publics avait pourtant imposé à la Compagnie « l’obligation de mettre à ses frais et en bon état la viabilité du chemin d’accès à la gare ». En 1879, la Municipalité faisait des concessions,  elle décidait  « de payer la valeur intégrale des terrains acquis pour la création du chemin d’accès à la gare entre le chemin n° 15 et le ruisseau des Fontaines d’Ozon puis de payer la moitié de la valeur des terrains nécessaires entre le ruisseau et la gare et enfin de laisser toute latitude à l’Administration pour la déclivité du chemin

L’affaire semblait….. en bonne voie.

Non, car la Municipalité était confrontée à  un nouvel écueil : le refus de tous les  propriétaires de céder les terrains nécessaires pour la réalisation du chemin. Le Maire de Huismes demandait alors qu’une déclaration d’utilité publique soit rendue et établie en faveur de la Commune (les prix offerts, entre 45 F. et  60 F. l’are, étaient pourtant beaucoup plus élevés que la valeur réelle). En 1880, 6 propriétaires sur 7 adhéraient à la vente. Un seul, M. Isle de Beauchaine, propriétaire de l’Ermitage, refusait encore les conditions de vente. Nouvelle entrave aux travaux ! En 1881, le Tribunal prononçait, pour cause d’utilité publique, l’expropriation  des parcelles de M. Isle de Beauchaine toujours aussi exigeant pour le prix de ses terrains (26,21 ares). En 1883, face à l’inertie de la Compagnie, le Conseil Municipal, excédé « retire tous ses votes précédents relatifs aux offres qu’il a faites et prie le Préfet de forcer la Compagnie à exécuter le plus vite possible la voie d’accès à la gare que les habitants attendent depuis 8 ans ».

Il faudra attendre encore 3 ans pour que la situation financière de la Commune permette de reprendre le projet de construction du fameux chemin. Mais en 1887, la procédure d’expropriation du terrain de M. Isle de Beauchaine était à refaire pour cause d’irrégularité. L’Administration du Chemin de Fer proposait au Maire d’accepter un traité de cession amiable (60 F. l’are au lieu de …..50 F.) obtenu de M. Isle de Beauchaine. Le Conseil Municipal cédait donc devant les exigences du propriétaire récalcitrant pour ne pas retarder les travaux qui vont enfin être réalisés après de longues années d’attente. Le 19 Août 1888, le Maire « considérant que le chemin d’accès à la gare est terminé, les travaux  ayant été exécutés conformément aux règles de l’art, il peut être enfin livré à la circulation, l’entretien ultérieur restant à la charge de la Commune ». Les habitants de Huismes auront attendu treize ans pour accéder enfin à  la gare par le « chemin neuf ». Ironie du sort, 120ans  après, cette gare désaffectée, n’est plus accessible puisque la S.N.C.F. a vendu le bâtiment à un particulier.

Aujourd’hui, le train passe mais…… ne s’arrête  pas !

Jean MEUNIER

Sources : Archives Municipales de Huismes